“Ce qui m’intéresse dans mon métier, c’est de découvrir des secteurs d’activité très différents les uns des autres. Parce qu’à chaque fois les thématiques et les problèmes rencontrés qu’ils soient comptables ou fiscaux sont différents et propres à chaque entreprise et chaque secteur d’activité.”
A la base, pour être comptable, je pense qu’il faut être quelqu’un d’organisé et de rigoureux. Et pour faire la différence, il faut être ouvert aux différents métiers de l’entreprise. Ma formation en école de commerce m’a justement permise d’avoir une vision de l’entreprise plus large que dans les formations comptables classiques.
Personnellement, je passe environ 60% de mon temps avec le service informatique. Donc il faut être ouvert et rester à l’écoute des besoins de son équipe, mais aussi des besoins des autres pôles de l’entreprise. Notre service informatique centralise ces besoins. Ensuite, nous travaillons de manière transverse entre les différents services.
Par exemple, actuellement, le service RH est en train de mettre en place un outil de gestion de congés, de suivi des formations et de gestion des de notes de frais. Ce point sera totalement dématérialisé et en lien direct avec la comptabilité. Cela va nous permettre d’automatiser et de dématérialiser toute cette activité qui est très chronophage pour notre service.
Actuellement, nous n’avons pas d’environnement “Cloud” pour centraliser et sécuriser tous nos documents, nous sommes donc obligés de stocker les factures et les notes de frais au format papier chez un prestataire. Je rêve du jour où nous n’aurons plus besoin d’aller chercher ces documents au quotidien ou lors des contrôles fiscaux.
“Pour être un bon comptable, il faut être ouvert et rester à l’écoute des besoins de son équipe, mais aussi des besoins des autres pôles de l’entreprise”
Les plus gros défis auxquels j’ai été confrontés étaient des projets informatiques structurants pour l’entreprise comme la mise en place d’un ERP. C’est d’ailleurs en partie grâce à cette expérience que j’ai été embauchée à mon poste actuel.
En effet, je suis arrivée au poste que j’occupe actuellement lors de la mise en place d’un nouvel ERP, car j’avais déjà eu une expérience de migration. J’ai dû à la fois prendre connaissance du groupe, ses processus et ses spécificités comptables et fiscales, faire en sorte que l’ERP réponde aux besoins de mon service, assurer la supervision de l’arrêté annuel et former l’équipe au nouvel outil.
Je me suis beaucoup appuyée sur l’équipe en place pour être à jour des différents processus et de l’arrêté des comptes. Puis je les ai accompagnés dans la prise en main de l’ERP car il était essentiel qu’ils y adhèrent.
Mettre en place un ERP, cela demande une bonne compréhension des besoins de la société pour faire en sorte que l’outil y réponde. Cela a nécessité ensuite d’effectuer de nombreux tests, de former les futurs utilisateurs et de rédiger les modes opératoires. C’est un vrai challenge surtout lorsqu’on est en plein arrêté des comptes annuels et qu’il faut répondre aux questions des commissaires aux comptes.
Mais, même si c’était compliqué, je suis très fière d’avoir participé à ce projet.
Je suis abonnée au Feuillet Rapide de Francis Lefebvre. Je participe aux Cercles des comptables de la Revue fiduciaire, qui a lieu trois fois par an et puis, j’assiste aux conférences des cabinets PWC et Deloitte sur des sujets comptables et fiscaux.
L’un des gros challenges à venir pour la profession est, à mon avis, le passage à la dématérialisation. A horizon 2024, la loi nous oblige à envoyer nos factures sous format crypté aux clients assujettis français. Il faut donc qu’on soit également en mesure de lire les fichiers qu’on nous envoie.
Puis en 2025 ou 2026 selon la taille des sociétés, nous devrons envoyer au fisc des états avec le détail de toutes nos factures. Il est essentiel que chaque entreprise anticipe la mise en place de ces process en s’équipant des outils adéquats.
L’évolution des réglementations nous fait constamment remettre en cause nos processus et nos outils. Un exemple récent est la déclaration de la TVA sur les acomptes reçus qui a été rendue obligatoire à compter de janvier 2023. La plupart des logiciels n’étaient pas paramétrés pour cela.
De notre côté, nous avons dû faire des développements informatiques spécifiques, faire des tests pour s’assurer du bon fonctionnement et de la non régression du système. Tout cela prend du temps et a un coût certain pour les entreprises.
Je ne pense pas que l’on puisse encore parler de comptabilité 4.0.
Il faut encore attendre quelques années. Les entreprises s’adaptent en fonction de leurs besoins et de leurs moyens. S’il n’y a pas de règles ou de contraintes de faire un quelconque changement, certaines entreprises ne se mettront pas forcément à la digitalisation comptable.
Cependant, les décisions gouvernementales et les événements exceptionnels ne peuvent qu’accélérer ces changements.
Je pense que l’on parlera d’une comptabilité 4.0 lorsque toutes les entreprises adopteront des outils innovants qui accompagneront les utilisateurs sur leurs tâches les plus difficiles ou très chronophages mais sans valeur ajoutée. Aujourd’hui nous travaillons encore beaucoup sur papier, nous utilisons énormément Excel.
Beaucoup de choses peuvent encore s’automatiser.
“Les décisions gouvernementales et les événements exceptionnels ne peuvent qu’accélérer les changements digitaux”
Le confinement nous a obligé à dématérialiser nos dossiers d’arrêté.
Mais le vrai tournant, c’était il y a déjà 20 ans, lors de mon passage sur mon 1er ERP !
C’est l’étape qui m’a fait passer un cap parce qu’il permet de décortiquer tous les flux comme dans un jeu de piste.
Avant je faisais la comptabilité de mon côté, sans avoir forcément de la visibilité sur ce que faisaient les autres services.
Après j’ai eu accès aux détails des commandes de ventes et d’achats, aux flux de stocks directement depuis les écritures comptables. C’était un vrai tournant dans ma façon de travailler.
Il faut trouver l’outil qui remplisse tous les critères. Il doit à la fois lire les fichiers cryptés, permettre de dématérialiser le traitement des factures fournisseurs tant au niveau de la commande d’achat, du work flow de validation, de leur comptabilisation, de leur stockage. Il doit aussi respecter les contraintes internes (lien avec l’ERP par exemple) et les contraintes fiscales (piste d’audit…).
Le métier de comptable, c’est aussi çà : savoir s’adapter aux outils, anticiper leur mise en place et rester toujours à l’écoute de l’entreprise et de son environnement.
Mathieu BROTHIER
CMO & Co-fondateur
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