Interview Arnaud JOERGER
Arnaud JOERGER : Les clés pour prospérer dans l’industrie du transport Interview 14 septembre 2023 Avec plus de 30 ans d’expérience dans le l’industrie du transport routier de marchandises, Arnaud JOERGER a débuté son parcours en tant que responsable d’exploitation et d’affrètement en Allemagne pendant une quinzaine d’années. Arnaud a pu consolider son expérience en travaillant dans de grandes entreprises, passant par DHL ou GEFCO jusqu’à aujourd’hui Daher, en occupant le poste de directeur du transport et des activités de l’entreprise depuis deux ans. Fort d’expériences en Allemagne et en France, Arnaud identifie des différences marquées entre les modes de travail entre ces deux pays, notamment dans les relations avec les clients et la façon dont les postes sont structurés. Avec une carrière marquée par une évolution constante, des prises de responsabilités toujours plus importantes et une expérience diversifiée, Arnaud partage ses réflexions sur l’industrie du transport et de la logistique. Selon vous, quelles sont les qualités clés pour réussir dans le domaine du transport ? Pour réussir dans le domaine du transport, il est primordial d’avoir des compétences techniques solides. Il faut avoir une connaissance approfondie de tous les métiers avant de prendre des postes à responsabilités. Même en tant que responsable ou chef, Il est important de rester impliqué dans la gestion de l’entreprise et d’y comprendre sa mission. En France, on a tendance à plus mettre l’accent sur la finance et la gestion, alors qu’en Allemagne, les chefs d’entreprises conservent souvent une partie technique de leur activité. Il faut également avoir une ouverture d’esprit et être attentif aux évolutions du secteur, notamment en ce qui concerne les nouvelles énergies comme les biocarburants et les camions électriques. Nous avons choisi de nous positionner à l’avant-garde et cela a été très bien accueilli par les clients. Les transporteurs suivent les tendances, plutôt que de les anticiper, mais nous sommes convaincus que l’innovation est la clé de la réussite dans ce domaine. Comment avez-vous travaillé à développer ces qualités au cours de votre carrière ? J’ai été confronté à de nombreux défis au cours de ma carrière. Des situations de blocage, des grèves et même des crises totales ont été monnaie courante dans notre secteur. Par exemple, lors du rachat de DHL Express par le groupe Mory, nous avons dû faire face à une grève qui a considérablement perturbé nos opérations de livraison. Malgré cela, nous avons tout de même réussi à livrer nos clients dans les délais impartis. Aussi, l’année 2020 a été une période particulièrement difficile pour notre entreprise en raison de la pandémie mondiale de COVID-19. Le secteur a été mis à rude épreuve pour approvisionner les grandes surfaces en fruits, légumes et produits alimentaires, ce qui a nécessité beaucoup de transport et d’efforts pour l’industrie de transport. Pour moi, cela a été particulièrement difficile car à ce moment-là, j’étais en congé et j’ai dû revenir en urgence pour aider l’entreprise à faire face à cette crise. Malgré ces difficultés, nous avons travaillé dur pour maintenir notre activité transport et surmonter ces obstacles. “Il faut avoir une ouverture d’esprit et être attentif aux évolutions du secteur, notamment en ce qui concerne les nouvelles énergies comme les biocarburants et les camions électriques”. Pouvez-vous nous parler de l’entreprise dans laquelle vous travailler et de son rôle dans l’industrie du transport ? Daher est le plus ancien constructeur d’avions en activité, spécialisé dans la fabrication des gammes d’avions TBM et Kodiak. En plus de ses propres avions, l’entreprise commercialise sa propre logistique et offre des services de développement, de certification et de soutien technique pour d’autres flottes aéronautiques. Daher produit également des pièces aéronautiques et propose sa propre logistique. Cette entreprise est un acteur clé dans le secteur aéronautique, offrant à la fois des avions, des pièces et des services spécialisés. Comment voyez-vous l’avenir de l’industrie du transport ? Quelles sont les tendances futures ? Je pense que nous allons voir une forte innovation dans ce domaine, car jusqu’à présent, les transporteurs ont suivi plutôt que de proposer des solutions novatrices. Cependant, de nouveaux transporteurs émergent avec des solutions plus aptes, comme les biocarburants, qui offrent de bonnes alternatives pour réduire les émissions de CO2. Nous sommes également confrontés à une bataille tarifaire, où la qualité de service est primordiale. L’innovation est également un élément clé, et je suis fier de travailler dans une entreprise qui teste et utilise les biocarburants dans ses avions pour aider les clients à réduire leurs émissions de CO2. Il est possible que nous assistons à l’arrivée des camions et drones autonomes, mais cela reste une vision plutôt lointaine, car il y a encore beaucoup de réglementations à mettre en place pour leur utilisation. Personnellement, je pense que le transport doit rester personnalisable, car c’est un domaine qui nécessite une attention particulière. Nous devrons donc trouver un équilibre entre la technologie et le facteur humain pour améliorer la sécurité et réduire les coûts de transport. En fin de compte, je suis convaincu que l’innovation, la qualité de service et la personnalisation sont les clés pour l’avenir de l’industrie du transport. “Le transport et la logistique sont des secteurs qui présentent de nombreux défis, mais je suis fier de travailler dans un domaine qui est essentiel pour la continuité des activités économiques et qui contribue à la vie quotidienne des gens en assurant la livraison de leurs produits”. Selon vous, quelle est l’évolution actuelle des coûts de l’industrie du transport de marchandises ? Actuellement, les coûts du transport de marchandises sont élevés et leur évolution ne semble pas s’inverser. Les prix du carburant ont diminué par rapport à l’année 2020, mais ils sont encore plus élevés qu’il y a quelques années. Les coûts de personnel ont connu une hausse notable de 12% l’année dernière et sont prévus pour augmenter d’au moins 6% cette année. Cette tendance s’ajoute à une augmentation des prix des camions de 15 à 20% sur les quatre dernières années. Parallèlement, le métier de chauffeur de poids lourds devient de plus en plus
Interview Jean-François DELAGE – Les secrets d’une supply chain performante
Jean-François DELAGE : les défis et les opportunités d’une supply chain Interview 17 août 2023 Jean-François DELAGE a passé plus de 35 ans dans le domaine de la supply chain, en travaillant pour différentes entreprises. Il a commencé sa carrière chez Procter & Gamble où il a occupé plusieurs fonctions dans des unités de production avant d’évoluer vers les métiers dans le domaine de la supply chain , puis a rejoint Peaudouce en tant que Directeur des flux matières, où il a encadré une équipe de 105 personnes. Il a ensuite passé 25 ans chez McCain, où il a géré une supply chain N-to-N. Au fil des années, Jean-François a évolué vers des responsabilités de business développement (direction d’une Business Unit) et a été directeur de la R&D chez McCain pendant cinq ans. Sa mission préférée a été de piloter l’Innovation Lab pour le futur de McCain, où il a pu mettre en place toutes les briques de la supply chain pour rendre développer et lancer une nouvelle gamme de produits. Pour Jean-François, les 25 dernières années ont été les plus enrichissantes, car elles ont été les plus complètes. En tant que responsable de la supply chain, il était à l’interface de tous les services de l’entreprise, ce qui lui a permis de comprendre le fonctionnement de l’entreprise dans son ensemble. Sa deuxième expérience marquante a été lorsqu’il a dirigé une Business Unit, où il a pu piloter toute l’activité en ayant une action sur tous les leviers de fonctionnement de l’entreprise. Depuis 18 mois, Jean-François est consultant indépendant, il accompagne les dirigeants de PME, TPE et Startups de l’agroalimentaire dans l’optimisation de la Supply Chain pour renforcer la performance de l’entreprise. Selon vous, quelles sont les qualités clés pour réussir dans le domaine de la logistique et du transport ? Lorsqu’on travaille dans le domaine de la logistique et du transport, il est primordial de bien comprendre les processus clés de l’entreprise. Ces processus sont liés les uns aux autres et il est important de comprendre leurs interactions avec les équipes, afin de résoudre les conflits de priorités et d’objectifs. Cette compréhension s’acquiert avec l’expérience, en passant par différents postes et responsabilités au sein de l’entreprise. Il est crucial de comprendre que les problématiques de la logistique et du transport impliquent tous les domaines de l’entreprise, tels que le marketing (traçabilité) et les ventes (conditions générales de vente, taux de service clients). Chaque service a des attentes et des priorités différentes, et il est important d’offrir des solutions pertinentes pour aligner tous les services sur la stratégie de l’entreprise. Il n’y a pas de “mode de fonctionnement” unique , mais plutôt des principes généraux qu’il faut adapter en fonction de la stratégie et des objectifs de l’entreprise. Pour réussir dans ce domaine de la logistique et du transport, il faut être capable de prendre des décisions et de faire des recommandations en étant en phase avec les départements de l’entreprise , en prenant en compte les priorités et les objectifs de chacun. Cette phase d’ouverture, de compréhension et de résolution de problèmes permettra de trouver des solutions ensemble, pour le bénéfice de tous et dans l’intérêt de l’entreprise et de ses clients. Il est important d’être un facilitateur transversal au sein de l’entreprise, en jouant un rôle clé dans l’alignement de tous les services. Faire preuve de bon sens et être capable de s’adapter en permanence est également une qualité essentielle dans ce domaine. En résumé, réussir dans le domaine de la logistique et du transport nécessite une compréhension approfondie des processus clés de l’entreprise, une capacité à s’adapter en permanence, et une aptitude à travailler en équipe pour atteindre les objectifs communs. Est-ce que vous pourriez donner un exemple de situation difficile que vous avez eu à gérer dans votre travail et ou avec votre équipe ? Il y a quelques années, lors de mon expérience chez McCain, j’ai été confronté à un problème de qualité de service rendu aux clients, ce qui avait un impact négatif sur leur satisfaction. Les camions étaient en retard, les erreurs de préparation de commandes étaient courantes et le service global n’était pas à la hauteur des attentes. Avec l’équipe commerciale, nous avons décidé de prendre des mesures pour améliorer cette situation. Nous avons commencé par réécrire les contrats avec les transporteurs en re-définissant ce que nous attendions d’eux et en mettant en place des indicateurs de performance pour mesurer leur qualité de service. Nous avons fixé des critères tels que la propreté des camions, la présence du chauffeur au chargement et au déchargement pour vérifier la qualité des palettes livrées aux clients et la ponctualité aux rendez-vous du chargement et déchargement. Pour impliquer les transporteurs dans cette démarche qualité, nous avons organisé des réunions formelles deux à trois fois par an avec tous les transporteurs avec lesquels nous travaillions en France. Les indicateurs de performance étaient revus et nous les encouragions à participer à cette démarche de qualité avec leurs équipes de conducteurs. Nous avons ensuite organisé un concours pour mobiliser tous les chauffeurs de toutes les sociétés de transport et les encourager à atteindre les objectifs fixés. Pendant trois mois, nous avons suivi transport par transport tous les critères de mesure de performance. À la fin de cette période, nous avons organisé une cérémonie de remise des trophées à Paris sur une péniche en présence d’un représentant de la Fédération Nationale des Transports Routiers et nous avons récompensé les dix meilleurs transporteurs de dix sociétés différentes. Ces mesures avaient pour but de valoriser et de reconnaître la qualité du travail des chauffeurs et d’afficher l’importance du service rendu aux clients par McCain . Nous souhaitions montrer que le chauffeur était l’ambassadeur de l’entreprise auprès des clients et qu’il représentait la marque. Pour McCain, il était crucial d’avoir une bonne image et des transporteurs qui comprenaient cette exigence de qualité. “Réussir dans le domaine de la logistique et du transport nécessite une compréhension approfondie des processus clés de l’entreprise, une
Interview – Fabien ESNOULT (SprintProject)
Interview Fabien ESNOULT – SprintProject Interview 13 mars 2024 À l’approche de la SITL 2024 (Semaine de l’Innovation du Transport et de la Logistique), nous vous invitons à découvrir une interview avec Fabien ESNOULT, président et fondateur de SprintProject. Lors de cet échange, Fabien partage ses idées sur la vision et les objectifs de SprintProject, l’origine et l’impact du Start-Up Contest, ainsi que les innovations marquantes dans le secteur du transport et de la logistique. Pour découvrir l’interview vidéo : SOMMAIRE Pour commencer, pouvez-vous présenter SprintProject ? Comment accompagnez-vous les startup de la filière supply chain ? Quels sont les critères de sélection des startup que vous soutenez ? Comment SprintProject s’inscrit-il dans le partenariat avec la SITL cette année ? Est-ce le même jury chaque année ? Quel est le moment fort de ce salon ? Quels sont vos objectifs et attentes pour cette édition de ce salon ? Voyez-vous une évolution des entreprises et startup cette année ? Quels sont les principaux défis et opportunités que vous rencontrez dans le domaine de l’innovation en supply chain ? “L’objectif de SprintProject est de faciliter les collaborations et les partenariats entre les startup et les grandes entreprises, en les accompagnant et en favorisant les échanges mutuels” Pour commencer, pouvez-vous présenter SprintProject ? Nous accompagnons des grands groupes pour leur innovation organisationnelle, notamment dans le domaine de la supply chain. Notre rôle consiste à effectuer une veille mondiale sur les réglementations et les avancées technologiques, et à aider les entreprises à définir leur stratégie d’innovation. Nous travaillons avec des start-up nationales et internationales pour les aider à adapter leur modèle. Parmi nos clients présents au salon, nous avons rencontré FM Logistic, DB Schenker, le Groupe Savoie et bien d’autres. Aujourd’hui est une journée chargée avec le Start-Up Contest que nous organisons, mais demain nous espérons avoir plus de temps pour explorer et poursuivre nos discussions, notamment avec les acteurs du fluvial sur la mutualisation du fret urbain. Comment accompagnez-vous les start-up de la filière supply chain ? Toutes les entreprises, qu’elles soient petites ou grandes, sont confrontées à des défis de transformation liés à des facteurs externes tels que la transition énergétique, les réglementations changeantes, les coûts croissants des matières premières et la pénurie de main-d’œuvre. Elles doivent s’adapter et trouver des stratégies pour le faire. C’est là que l’Open Innovation entre en jeu, en recherchant des solutions à l’extérieur de l’entreprise. En France et en Europe, nous avons la chance d’avoir de nombreuses startup qui se sont intégrées à notre secteur. Notre rôle est de rester constamment informés des évolutions mondiales en temps réel afin de fournir aux dirigeants les informations nécessaires pour prendre des décisions éclairées. Nous facilitons la collaboration entre les grandes entreprises et les start-up, qui ont des besoins différents mais peuvent s’entraider. Cette collaboration n’est pas facile, mais elle est essentielle pour stimuler l’industrie et créer des opportunités d’emploi. Quels sont les critères de sélection et d’évaluation des startup que vous soutenez ? Notre travail ne consiste pas à sélectionner, mais à analyser. Nous nous efforçons de comprendre les acteurs et les activités sur le marché, ainsi que le marché lui-même. La maturité technologique et du marché sont des éléments clés dont nous tenons compte. Nous évaluons où se situe une startup sur le plan technologique par rapport à ses concurrents internationaux, en utilisant une grille d’analyse appelée le “TRL” Technology Readiness Level). Nous examinons également l’état du marché à cet égard. En ayant une compréhension approfondie des capacités actuelles de la startup et de ses objectifs futurs, ainsi qu’une connaissance approfondie des enjeux et de la stratégie de nos grandes entreprises, nous pouvons identifier les opportunités au bon moment. L’objectif de SprintProject est de faciliter les collaborations et les partenariats entre les startup et les grandes entreprises, en les accompagnant et en favorisant les échanges mutuels. “Toutes les entreprises, qu’elles soient petites ou grandes, sont confrontées à des défis de transformation liés à des facteurs externes” Comment SprintProject s’inscrit-il dans le partenariat avec la SITL cette année ? Depuis 2019, nous sommes le partenaire innovation de la SITL. Notre collaboration a débuté avec la création du programme Start-Up Contest, en travaillant avec Alain Bagnaud et Thomas Desplanques. Nous avons élargi notre partenariat au fil des années, en animant avec des jurys, en fournissant des outils et en organisant des pitchs sur l’espace startup. Notre présence au sein de cet écosystème de startup est une nouvelle étape de notre partenariat en constante évolution. Nous avons continué à renforcer notre collaboration, car nous avons identifié le besoin des exposants et du marché de promouvoir la dynamique d’innovation. L’idée d’un espace accessible économiquement pour les startup est née de discussions avec Alain Bagnaud. Nous voulions créer un environnement où les startup pouvaient rencontrer les visiteurs et les exposants intéressés par des partenariats potentiels. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec les équipes du Reed pour développer le Village Start-Up, qui est devenu une réussite remarquable. Est-ce le même jury chaque année ? À chaque édition, j’anime le jury du Start-Up Contest de la SITL. Nous constituons un groupe d’experts engagés dans diverses associations professionnelles, ce qui nous donne une vision panoramique de nos métiers. Chacun apporte son expertise, qu’il s’agisse de la distribution, de l’intelligence artificielle ou d’autres domaines. Nous nous répartissons les thématiques en fonction de nos connaissances pour être plus pertinents. Chaque année, de nouvelles personnes rejoignent le groupe, tandis que d’autres partent en raison de changements de carrière et cette année, nous avons formé un groupe très sympathique. Quel est le moment fort de ce salon ? Le moment fort de ce salon est le Start-Up Contest, où nous sélectionnons sept startup sur la base de nombreux dossiers. J’organise des appels de préparation avec les startup pour les aider à optimiser leur présentation et à capter l’attention du public. C’est une façon de promouvoir la dynamique de notre profession et d’encourager les jeunes à rejoindre notre filière, qui compte 450 000 emplois en France.
Interview David SOURY
David SOURY“La durabilité dans le processus d’innovation de la logistique et du transport” Interview 19 juillet 2023 Pour cette cinquième interview, c’est avec David SOURY que nous échangeons. Avec plus de 30 ans d’expériences dans la logistique, David a accepté de nous en dire plus sur l’implication de la durabilité dans le processus d’innovation de la logistique et du transport. David travaille depuis toujours dans ce milieu, il a exercé les métiers principaux de la logistique, comme de l’opération à l’entrepôt, du management d’équipes et optimisation des organisations. David définit la logistique comme étant à la fois des standards et en même temps assez unique et spécifique à chaque entreprise. Salarié jusqu’en 2013 pour ensuite ouvrir sa boîte, David participe à la consolidation et l’organisation de PME et TPI. Il a travaillé dans des entreprises et centres de formations, pour former les salariés sur leurs choix stratégiques, Supply Chain et Lean Management. Dans la continuité de l’accompagnement et de son envie d’échanger et partager ses connaissances, 80% de son temps est consacré à intervenir dans des écoles sur des sujets relatifs à la supply chain. D’après lui : “La logistique est un des métiers où il faut être tourné vers l’humain. Malgré les apparences, avec le fait qu’il y ait beaucoup d’automatisation, l’essentiel de la logistique va se passer sur l’humain. Si l’on aime pas communiquer entre nous, il va manquer un plan concret au métier.” Selon vous, quelles sont les qualités clés pour réussir dans le domaine de la logistique et du transport ? Pour moi, les qualités qui font un bon logisticien vont être d’abord l’écoute puis l’empathie. C’est à dire qu’il faut que le métier soit quand même tourné vers l’humain d’une manière générale afin de bien faire passer les messages et les réceptionner. Pour une bonne logistique, un des outils principaux, n’est pas informatique mais humain : c’est la circulation d’informations. Si une personne n’est pas capable d’écouter et d’entendre ce qu’un collègue ou un membre de son équipe va lui faire remonter comme information, elle ne prendra pas forcément les bonnes décisions. C’est quelque chose qui peut, à terme, entraver sa performance à lui et à son équipe. C’est pour cela qu’un logisticien doit être empathique et curieux de savoir avec quelles personnes il travaille. La logistique rejoint la philosophie du Lean management (philosophie qui vient du Japon et qui prône le travail collectif et participatif). Une logistique qui fonctionne, ce n’est pas grâce à une personne qui fait tout le travail, mais parce que cette personne a réussi à manager et à entraîner une équipe. Pour conclure, on peut avoir de très bons techniciens et de très bons stratèges. Mais s’ils ne sont pas suffisamment empathiques, les équipes ne les suivront pas forcément et l’entreprise ne sera pas en phase avec ses performances. Avez-vous eu une situation difficile à gérer durant votre carrière ? Durant mon parcours, j’ai eu une expérience en tant que salarié et en tant qu’intervenant. J’ai longtemps travaillé à Lyonnaise des Eaux, à Bordeaux, en tant que responsable logistique pour l’Aquitaine normande, et j’ai dû gérer la plateforme logistique de cette société pour alimenter tous les secteurs Lyonnaise des Eaux qui étaient en périphérie. Mon rôle était de former en interne sur la méthode logistique en intervenant sur différents sites en local déportés. Le but était d’aider à l’organisation des magasins et à la réalisation des inventaires lorsque leurs résultats n’étaient pas très bons. J’avais un peu un rôle de formateur, voir parfois de coach, car les personnes qui étaient dans les magasins n’étaient pas forcément formées à ces méthodes et étaient en situation d’échec par rapport aux objectifs qu’elles ne pouvaient pas atteindre. La deuxième expérience qui est vraiment significative pour moi, a été lorsque j’ai travaillé dans une société en région bordelaise, qui fabriquait des remorques de signalisation. Là-bas, il y avait à la fois un atelier de fabrication et en même temps un site logistique. Et dans cette entreprise, j’ai fait à la fois une mission de retournement (mettre en place des processus, des stratégies afin d’améliorer la performance et organiser la logistique dans l’entreprise) et en même temps, un accompagnement humain très important parce que les salariés étaient en souffrance, ils subissaient leur activité et étaient au bord de la rupture. C’était un quasi coaching collectif, car il a fallu faire monter en confiance cette équipe, lui faire prendre de l’ampleur, la faire monter en compétence et qu’elle retrouve un moral suffisant pour pouvoir aborder une nouvelle phase de son travail. Donc, cela a été une expérience enrichissante parce que j’ai eu de très bons résultats, à la fois techniques, au niveau de la logistique, mais surtout au niveau humain. La cohésion et le bon état d’esprit au sein d’une équipe, et notamment dans la logistique, je dirais que c’est 70 ou 80 % de la performance. “La cohésion et le bon état d’esprit au sein d’une équipe, et notamment dans la logistique, je dirais que c’est 70 ou 80 % de la performance.” Selon vous, qu’est ce que la logistique verte et quelles en sont ses principales caractéristiques ? La logistique verte a pris naissance à partir du moment où la notion de développement durable a été évoquée dans les années 90. À partir du moment où il y a des flux dans une entreprise (financiers, physiques et d’informations), il y a une logistique. Et cette dernière va recevoir des marchandises et les distribuer tout en intégrant une démarche écologique visant à réduire les impacts de l’entreprise sur son environnement. Mais comment réduire ses impacts sur son environnement ? Le responsable / directeur logistique va devoir prendre en compte les attentes des clients parce que de plus en plus de consommateurs sont sensibles à ces notions. La logistique va prendre en compte cette démarche durable en essayant de réduire au maximum les impacts sur l’environnement, comme les émissions de gaz à effet de serre liés aux transports, les déchets suite aux emballages des
Jean-François REY “Une Supply Chain optimisée, digitale et durable”
Jean-François REY “Une supply chain innovante, green et digitale” Interview 23 février 2023 Pour donner suite à notre série d’interviews sur l’automatisation de la comptabilité avec Nga et Carole ou la digitalisation de la Supply Chain avec Michel Philippart, nous donnons aujourd’hui la parole à Jean-François REY. Breton d’origine, Jean-François a étudié à SKEMA dans les années 80 et a continué son parcours à Concordia University (université anglophone à Montréal, Canada). Sa première expérience en supply chain date de 1992. Il a eu l’opportunité de commencer chez Becton Dickinson, à Grenoble au siège européen de cette entreprise américaine du secteur médical, intervenant sur des problématiques de gestion de stock, planification de production et prévisions des ventes. Parti ensuite au Canada où il est devenu consultant, Jean-François avait pour mission de sélectionner et d’implanter des ERP (Enterprise resource planning: système de gestion de l’ensemble des processus d’une entreprise), APS (Advanced planning system: planification des activités supply chain), TMS (Transport management system: outil de gestion et d’optimisation de la chaîne logistique et du transport) et WMS (Warehouse management system: outil de gestion des activités d’un entrepôt) dans de grandes entreprises (Alcan, Sony, Bombardier, Radio Canada…). Si nous devions donner 3 critères qui caractérisent Jean-François, ce serait : la supply chain innovante, l’international, et le sport. Ils ont été mis en commun lorsqu’il est allé travailler 8 ans chez Decathlon en tant que responsable du pilotage des projets supply chain, au début des années 2000, pour ensuite continuer chez le Coq Sportif pendant 2 ans, et Kiabi pendant 9 ans. Récent PMO (Project management officer) de l’association France Supply Chain, Jean-François a gentiment accepté de nous faire un retour sur ses différentes expériences et de donner son avis sur la digitalisation, la durabilité, les activités et les métiers de la supply chain, ainsi que d’évoquer le futur et les tendances actuelles du secteur. D’ailleurs, France Supply Chain c’est quoi ? France Supply Chain est une association à but non-lucratif, comprenant plus de 450 membres : entreprises, chargeurs et transporteurs. Cette diversité fait notre différence et notre richesse. Là où beaucoup d’autres associations ont uniquement des logisticiens et transporteurs, nous avons aussi beaucoup de chargeurs. Le but de l’association est de produire du contenu (livres blancs, séminaires, conférences, tables rondes, webinars, etc…) sans avoir de démarches commerciales. Nous produisons du contenu de valeur, avec nos membres, pour nos membres. Les grands thèmes de travail de notre association sont tous des thèmes d’actualité, qui concernent toutes les entreprises : La digitalisation : Automatisation, IA, data, blockchain, cyber sécurité… ; L’humain : Il existe aujourd’hui de grosses difficultés pour recruter et un manque de connaissances des métiers de la supply chain ; La durabilité : Énorme sujet d’actualité. La circularité, la traçabilité et le côté “Green” de la supply chain qui représente 60 à 70 % des coûts d’une entreprise et est donc un très gros levier de transformation. Lors de vos expériences passées, quels ont été les plus gros leviers de changement que vous avez dû mettre en place ? Quelle que soit la période, j’ai toujours eu à m’adapter aux différents événements et d’après mon expérience, je pense qu’il est important de classer ces leviers en plusieurs catégories : La stratégie supply chain : pour écrire au sein des comités de direction la route que l’on souhaite tracer pour nos clients, la manière et la rapidité dont on veut répondre à leurs besoins (Quels marchés souhaite-t-on couvrir, avec quels fournisseurs et dans quels pays d’origine, quels produits et composants, quels moyens de livraison, quels niveaux de stocks…) ; La culture supply chain innovante : Arrêter de raisonner en silos et travailler en mode collaboratif, les uns avec les autres, pour servir le client final. C’est quelque chose qu’il faut faire comprendre à tous les différents niveaux de l’entreprise ; L’organisation : Les achats, la production, le transport, l’entreposage et le service client doivent être autonomes, mais travailler sous un chapeau global de direction supply chain qui coordonne les activités et fait les arbitrages ; Les indicateurs de performance communs : La mise en place d’indicateurs collaboratifs. Il faut penser indicateur final, tout au long de la chaîne d’approvisionnement : le client final veut être livré à temps ET au bon prix ! ; Les processus collaboratifs : Mettre en place des workflows dans lesquels chaque personne a un rôle spécifique dans la chaîne globale. Et des processus de planification pour anticiper les problèmes et prévoir des scénarios différents pour y répondre ; L’IT, des outils sophistiqués et intégrés : Derrière ces processus, ce sont les outils informatiques. La plupart des données sont stockées sur le cloud, le web, et sont de moins en moins hébergées. La traçabilité et la “data” sont les clés d’une supply chain efficace, et d’un bon pilotage/synchronisation des différentes activités. Tous ces éléments sont des moyens pour transformer une supply chain innovante, afin de pouvoir collaborer facilement et efficacement entre interlocuteurs : clients, partenaires, et fournisseurs aux 4 coins de la planète. “La stratégie ainsi que la culture d’une supply chain innovante, l’organisation, les indicateurs de performance communs, les processus collaboratifs et l’IT sont des moyens pour transformer la collaboration et la communication” Selon vous, pourquoi le coût du transport de marchandises augmente considérablement en ce moment ? C’est un problème d’offre et demande. La Covid a fortement impacté cet équilibre. Lors d’événements de ce genre, la production est fortement impactée. Le coût du transport augmente car l’offre diminue. Dans le maritime, le nombre de bateaux a été de plus en plus réduit, faute de produits à transporter. Il y a eu aussi des blocages au niveau des ports, notamment ceux de Chine, qui représentent une très grande partie des flux mondiaux. Tout était congestionné, il n’y avait plus de bateaux pour charger les conteneurs, même si les usines recommençaient à produire. Tout a été chamboulé. On a ajouté à cela la crise du gaz en Ukraine, l’augmentation des coûts de l’énergie, la pression pour “verdir” les moyens de transport et les difficultés générales en
Catherine Descorps – Digitalisation comptable : Les nouveaux défis
Catherine Descorps “Répondre aux Challenges de la digitalisation comptable” Interview 21 janvier 2023 Pour donner suite à notre échange avec deux professionnelles de la comptabilité, Nga & Carole (anciennement Deloitte), nous nous sommes aujourd’hui entretenus avec Catherine Descorps, experte de la comptabilité depuis plus de 25 ans. Catherine nous dévoile quelles sont les qualités les plus importantes d’un(e) comptable, quels sont les défis à anticiper et comment ce métier est amené à évoluer grâce à la digitalisation comptable. Catherine a d’abord étudié à l’ESC Montpellier (école supérieure de commerce) et a ensuite obtenu un diplôme DECF (Diplôme d’études comptables et financières), pour ensuite commencer sa carrière dans un cabinet d’expertise. Elle s’est ensuite rapidement dirigée vers des gros groupes, comme Altran Technologie. Après avoir passé dix ans dans l’armement, chez Roxel France, Catherine est depuis 2012 dans le monde du vin chez Duclot (négoce, exploitation viticole). Sa mission est de superviser toute la partie compta et fiscalité. “Ce qui m’intéresse dans mon métier, c’est de découvrir des secteurs d’activité très différents les uns des autres. Parce qu’à chaque fois les thématiques et les problèmes rencontrés qu’ils soient comptables ou fiscaux sont différents et propres à chaque entreprise et chaque secteur d’activité.” Quelles sont les qualités qui vous ont été les plus importantes durant votre carrière ? A la base, pour être comptable, je pense qu’il faut être quelqu’un d’organisé et de rigoureux. Et pour faire la différence, il faut être ouvert aux différents métiers de l’entreprise. Ma formation en école de commerce m’a justement permise d’avoir une vision de l’entreprise plus large que dans les formations comptables classiques. Personnellement, je passe environ 60% de mon temps avec le service informatique. Donc il faut être ouvert et rester à l’écoute des besoins de son équipe, mais aussi des besoins des autres pôles de l’entreprise. Notre service informatique centralise ces besoins. Ensuite, nous travaillons de manière transverse entre les différents services. Par exemple, actuellement, le service RH est en train de mettre en place un outil de gestion de congés, de suivi des formations et de gestion des de notes de frais. Ce point sera totalement dématérialisé et en lien direct avec la comptabilité. Cela va nous permettre d’automatiser et de dématérialiser toute cette activité qui est très chronophage pour notre service. Actuellement, nous n’avons pas d’environnement “Cloud” pour centraliser et sécuriser tous nos documents, nous sommes donc obligés de stocker les factures et les notes de frais au format papier chez un prestataire. Je rêve du jour où nous n’aurons plus besoin d’aller chercher ces documents au quotidien ou lors des contrôles fiscaux. “Pour être un bon comptable, il faut être ouvert et rester à l’écoute des besoins de son équipe, mais aussi des besoins des autres pôles de l’entreprise” Pouvez-vous nous donner un exemple de défi auquel vous avez été confronté au travail et nous expliquer de quelle façon vous l’avez résolu ? Les plus gros défis auxquels j’ai été confrontés étaient des projets informatiques structurants pour l’entreprise comme la mise en place d’un ERP. C’est d’ailleurs en partie grâce à cette expérience que j’ai été embauchée à mon poste actuel. En effet, je suis arrivée au poste que j’occupe actuellement lors de la mise en place d’un nouvel ERP, car j’avais déjà eu une expérience de migration. J’ai dû à la fois prendre connaissance du groupe, ses processus et ses spécificités comptables et fiscales, faire en sorte que l’ERP réponde aux besoins de mon service, assurer la supervision de l’arrêté annuel et former l’équipe au nouvel outil. Je me suis beaucoup appuyée sur l’équipe en place pour être à jour des différents processus et de l’arrêté des comptes. Puis je les ai accompagnés dans la prise en main de l’ERP car il était essentiel qu’ils y adhèrent. Mettre en place un ERP, cela demande une bonne compréhension des besoins de la société pour faire en sorte que l’outil y réponde. Cela a nécessité ensuite d’effectuer de nombreux tests, de former les futurs utilisateurs et de rédiger les modes opératoires. C’est un vrai challenge surtout lorsqu’on est en plein arrêté des comptes annuels et qu’il faut répondre aux questions des commissaires aux comptes. Mais, même si c’était compliqué, je suis très fière d’avoir participé à ce projet. Comment vous tenez-vous au courant des changements réglementaires ou des tendances comptables ? Je suis abonnée au Feuillet Rapide de Francis Lefebvre. Je participe aux Cercles des comptables de la Revue fiduciaire, qui a lieu trois fois par an et puis, j’assiste aux conférences des cabinets PWC et Deloitte sur des sujets comptables et fiscaux. Quels sont les plus grands challenges pour la profession comptable en ce moment ? L’un des gros challenges à venir pour la profession est, à mon avis, le passage à la dématérialisation. A horizon 2024, la loi nous oblige à envoyer nos factures sous format crypté aux clients assujettis français. Il faut donc qu’on soit également en mesure de lire les fichiers qu’on nous envoie. Puis en 2025 ou 2026 selon la taille des sociétés, nous devrons envoyer au fisc des états avec le détail de toutes nos factures. Il est essentiel que chaque entreprise anticipe la mise en place de ces process en s’équipant des outils adéquats. En quoi la digitalisation comptable a un impact sur le métier ? L’évolution des réglementations nous fait constamment remettre en cause nos processus et nos outils. Un exemple récent est la déclaration de la TVA sur les acomptes reçus qui a été rendue obligatoire à compter de janvier 2023. La plupart des logiciels n’étaient pas paramétrés pour cela. De notre côté, nous avons dû faire des développements informatiques spécifiques, faire des tests pour s’assurer du bon fonctionnement et de la non régression du système. Tout cela prend du temps et a un coût certain pour les entreprises. La comptabilité est de plus en plus innovante et tech, peut-on parler, aujourd’hui, d’une comptabilité 4.0 ? Je ne pense pas que l’on puisse encore parler de comptabilité 4.0. Il faut encore attendre quelques
Nga Nguyen Carole Siebert “Les enjeux de l’automatisation dans la comptabilité moderne”
Nga Nguyen & Carole Siebert “Les enjeux de comptabilité automatisée” Interview 20 octobre 2022 Pour faire suite à notre première interview de Michel Philippart, nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec deux expertes en comptabilité automatisée. L’innovation est au cœur des directions comptables depuis plusieurs années, aussi de nombreuses questions nous sont venues en tête, notamment à propos de la conduite du changement, l’adoption des nouvelles technologies et les outils les plus utilisés par les équipes opérationnelles. Carole Siebert et Nga Nguyen, respectivement Directrice et Senior Manager du service Assistance Opérationnelle aux Directions Financières & Management de Transition chez Ad Astra (anciennement Deloitte Outsourcing) ont gentiment accepté de nous éclairer sur la comptabilité automatisée. Quels sont les plus gros changements auxquels vous avez dû faire face dans votre carrière comptable d’un point de vue technologique ? N.N : La démocratisation des ERP dans les années 2000 a été le premier gros changement. Plus récemment, j’ai participé à l’implémentation de l’outil Workday dans une entreprise. C’est un gros changement pour les comptables. On ne saisit plus des écritures comptables, on enregistre des opérations transactionnelles. Il n’y a plus de notion de débit /crédit, on ne démarre plus par un compte, mais par un événement (quel type de dépenses, quel type de revenus, etc.). C.S : J’ai participé à un projet Purchase To Pay (P2P) avec la mise en place d’un outil permettant l’automatisation et la dématérialisation de tout le processus : du bon de commande au paiement de la facture fournisseur. L’objectif de ce type de projet est d’automatiser le processus de bout en bout. Un workflow de validation est mis en place pour valider toutes les étapes du process : engagement de dépense, commande, réception, bon à payer. Toute la chaine est automatisée : L’écriture comptable est générée automatiquement à partir des informations reconnues par l’outil sur la facture fournisseur. Le rapprochement de la facture avec le bon de commande permet le déclenchement du « bon à payer ». Ces technologies d’automatisation et de dématérialisation existent depuis longtemps dans les grands groupes, elles s’imposent désormais dans les TPE/PME ainsi que les cabinets d’expertise. Quels sont, selon vous, les prochains gros challenges dans les Directions financières ? C.S : Les projets en cours concernent plus particulièrement l’automatisation des reportings permettant de bénéficier de meilleurs outils de pilotage de l’activité, notamment pour les équipes contrôle de gestion. Des outils comme Power BI permettent d’avoir des informations plus rapidement, en instantanée, agrégées et plus visuelles. L’information est accessible en quelques clics. N.N : Des progrès sont encore à faire sur les délais de clôture comptable. Dans de nombreux groupes, les clôtures durent encore jusqu’à 15 jours, alors que le standard serait plutôt 5/8 jours. Des outils existent, mais ne sont pas exploités à 100% et certains (beaucoup!) privilégient exclusivement Excel. Comment mener la conduite du changement dans les directions comptables ? N.N : La communication est primordiale. J’ai pu constater dans certaines entreprises des équipes dédiées à l’accompagnement des différents pays / filiales / services dans le changement. L’objectif est de favoriser l’adhésion. Des enquêtes, des ateliers et des formations sont menés… C.S : L’accompagnement au changement doit être vu comme un projet dans le projet. Cela passe d’abord par le sponsor de la Direction Générale qui doit montrer la trajectoire et définir des objectifs clairs. Ensuite, c’est à l’équipe projet de « porter la bonne parole » auprès des équipes, expliquer quels sont les bénéfices pour l’entreprise et pour les collaborateurs de ce changement. “La communication est la clé du succès” Comment favoriser l’adoption des nouveaux outils de comptabilité automatisée ? C.S : Tout d’abord, il faut montrer le bénéfice dans le quotidien, en termes d’intérêt du travail et d’optimisation de la charge de travail. L’automatisation des tâches à faible valeur ajoutée va permettre aux collaborateurs de pouvoir se concentrer sur des tâches d’analyses et de reporting. La conduite du changement est essentielle, et nécessite une préparation et un réel accompagnement des collaborateurs. N.N : Pour obtenir l’adhésion des collaborateurs aux nouveaux outils, il faut avoir une idée précise du métier de chacun et identifier les tâches qui nécessitent d’être automatisées. Les collaborateurs ont besoin de comprendre quel sera le bénéfice dans leur quotidien avant de parler du bénéfice pour l’entreprise. “Les collaborateurs ont besoin de comprendre quel sera le bénéfice dans leur quotidien avant de parler du bénéfice pour l’entreprise” Comment choisir un nouvel outil de travail pour la comptabilité automatisée ? C.S – N.N : Il y a beaucoup d’outils de comptabilité automatisée sur le marché ! Maintenant l’enjeu est d’identifier celui qui va répondre au mieux aux besoins du métier. Ensuite, il faut que le projet soit mené à bien avec des expressions de besoin précises et détaillées. Finalement, en tant que leader du changement, comment assurez-vous votre veille technologique en terme de comptabilité automatisée ? C.S – N.N : Nous assurons notre veille technologique par différents biais, en participant à des évènements et conférences organisés par des éditeurs, mais aussi grâce à nos interventions au sein de Directions Financières de différents secteurs et dans différentes tailles d’entreprise. Florian GEFFROY Copywritter et Digital Marketer pour DataFret florian.geffroy@datafret.com 👉 Tous mes articles et interviews Linkedin Twitter Youtube Rejoignez la communauté ! Newsletter acutalités Supply Tech C'est parti ! Bien reçu ! Vous allez recevoir notre prochaine newsletter ! Oups ! Cela ne fonctionne pas. Avez-vous bien écris votre adresse ? INTERVIEWS Interviews d’experts en Supply Chain, transport, logistique, tech, comptabilité et bien plus ! Parcourir > 5 octobre 2022 Jean-François REY France Supply Chain Retours d’expérience sur la digitalisation, la durabilité, l’adoption face aux crises et le futur de la supply chain Lire l’article 4 mai 2022 Michel Philippart Managing Director & directeur du MSc Strategy Nous explorons les sujets liés à la transformation digitale des entreprises et les avantages concurrentiels que cela peut créer. Lire l’article
Michel Phillippart “Gouvernance de la Transformation Digitale” Stratégie Supply Chain
Michel Phillippart “Transformation Digitale de la Supply Chain” Interview 4 mai 2022 Pour lancer notre série d’interviews, nous posons quelques questions aujourd’hui à Michel Philippart, professeur de Stratégies Supply à l’EDHEC Business School et directeur du MSc Strategy, Organisation Consulting & Digital Transformation. Ses principaux centres d’intérêt sont la gestion des relations avec les fournisseurs au sein de la Supply Chain et les technologies de rupture dans les opérations telles que l’IA, la Blockchain ou l’IoT. Après une formation d’ingénieur, Mr Philippart a tout d’abord travaillé dans l’aérospatial, pour enchaîner sur un MBA aux États-Unis, puis une période conseil dans la pratique achat, recruté ensuite par PepsiCo, puis McKinsey et GSK. Comme la transmission du savoir s’inscrit petit à petit comme une priorité pour notre invité, il écrit d’abord un premier livre “les achats collaboratifs – pourquoi et comment collaborer avec vos fournisseurs”, puis en 2016, il valide un doctorat pour être finalement engagé par l’EDHEC. C’est depuis ses bureaux Lillois qu’il a très gentiment accepté de répondre à nos questions, où nous explorons les sujets liés à la transformation digitale, son impact sur l’organisation des entreprises et les avantages concurrentiels que cela peut créer. Avec votre parcours, de mémoire, quel a été le plus gros changement que vous avez vécu dans la Supply Chain ? J’ai vu un certain nombre de changements, le premier c’était le renforcement des pratiques de “compliance”, être sûr que tous les documents soient certifiés, éviter les risques de corruption, etc. Les plus grands changements que j’ai pu vivre étaient dans les années 2000 et portaient vraiment sur la gestion des données et des systèmes qui y sont rattachés.En Supply Chain à proprement parler, c’était dans la pharma que le changement a été le plus important. Vu le nombre d’intervenants que l’on avait, le chantier était énorme en protection des données, certification des données, éthique etc. Et puis dans un deuxième temps, c’est un phénomène plus récent, que je vis plutôt en tant que chercheur, plutôt qu’en tant que participant : c’est l’évolution vers plus d’intelligence artificielle et la grosse question : “qu’est-ce qu’on fait avec les humains ?”. Parce qu’on ne peut pas dire simplement “je remplace les humains par des robots” et espérer que ça marche. Je dois rajouter à tout ça un changement fondamental de culture, c’est le passage de la gestion de la Supply Chain “comptable et purement financière” à son pilotage stratégique, “qu’est-ce qui va me permettre de me différencier de mes concurrents”. “Qu’est-ce qu’on fait avec les humains ?” À ce propos, quel type de technologie va engendrer le plus de transformation et d’éléments différenciateurs dans la Supply Chain dans les prochaines années ? Une techno en soit, ne peut pas être un facteur de différenciation. N’importe qui peut aller voir un des grands acteurs qui auraient inventé le fil à couper le beurre et lui dire “vendez-moi votre solution”. Compter sur la techno pour faire mieux que ses concurrents, ça peut vous apporter 6 mois d’avantages, mais dans le monde de la Supply Chain, personne ne va devenir le nouveau Google et espérer créer de la différenciation juste en achetant une techno. C’est la combinaison de l’innovation technologique en elle-même et la manière dont l’ensemble des ressources disponibles pour l’entreprise vont être mobilisé qui va faire que cette techno devienne un vrai avantage concurrentiel. Est-ce que c’est ce point qui vous a inspiré la notion de “la malédiction des 70%” dans la transformation digitale ? Oui en partie ! Les entreprises qui se sont mises à croire à la techno un peu comme une baguette magique en disant “je vais mettre telle technologie, ça va bien résoudre mes problèmes” ont investi beaucoup, et au bout du compte, elles n’arrivent pas aux résultats attendus. Le problème peut venir de la rébellion interne, ou bien de la techno en elle-même qui ne marche pas comme prévu ! Pour arriver à mettre la techno en place, il faut des humains agiles, il faut des humains motivés par ce qu’il va y avoir après et qui ne sont pas en train de défendre ce qu’il y avait avant. Sur ce point, comment une entreprise peut faire en sorte d’encourager l’adoption ? Quand le personnel passe beaucoup de temps à aligner des chiffres dans un tableau et autres tâches à faible valeur ajoutée, cela lui laisse peu de temps pour réfléchir à ce qui doit être fait. Le message important c’est que l’automatisation va dégager 80% des tâches récurrentes de son quotidien et cela dégage du temps pour prendre du recul et mettre à profit l’expérience des équipes. Il reste beaucoup de facteurs trop complexes pour qu’un automate puisse prendre une décision, c’est ce qui demande toute l’attention des entreprises aujourd’hui. On peut ainsi prendre de meilleures décisions, avec beaucoup de profondeur dans l’analyse. Par exemple dans la fonction comptable, l’objectif est d’aider à apprendre au système ce qu’il faut regarder. Les signaux faibles et les points critiques, etc. Une personne qui a 15 ans d’expérience est capable d’identifier les dichotomies du quotidien, alors que les données telles quelles n’en sont pas capables.Donc les entreprises qui fournissent la techno doivent aussi accompagner la formation et la prise en main des outils, et montrer aux opérateurs que sa valeur est elle beaucoup plus importante en identifiant les difficultés complexes, plutôt qu’en chassant les difficultés dans les cellules d’un tableur. “Une personne qui a 15 ans d’expérience est capable d’identifier les dichotomies du quotidien, alors que les données telles quelles n’en sont pas capables” Vous parliez du capital immatériel dans le pilotage de transformation numérique, ça rejoint ces points-là ? Oui, car cette valeur de l’expérience du/de la comptable sur sa capacité à identifier les vraies décisions complexe, elle n’apparaît pas dans un bilan ou dans un document comptable justement.On a tendance à dire “à l’heure cette personne coûte X”. Mais dans cette heure, le temps passé à regarder des lignes Excel, ce n’est pas la même chose que les moments où il/elle priorise une analyse sur